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La tyrannie du: "Je t'aime"

  • Photo du rédacteur: Florence
    Florence
  • 20 sept. 2024
  • 3 min de lecture

Dernière mise à jour : 18 mars



Ah! La fougue des débuts de relation, des premiers baisers, des premiers touchers, des premiers ébats et à un moment donné, irrésistiblement, cet état d'amour qui jaillit, qui doit à tout prix sortir de nous tel un soupir de soulagement par ces mots:

"Je t'aime".

Ce premier "Je t'aime" a quelque chose de solennel, d'officiel, il est la déclaration de sentiments puissants que l'on ne peut garder pour soi et pour certains, implicitement, la déclaration d'un engagement émotionnel à haute voie dans la relation. Ce premier "Je t'aime" réclame le courage de dépasser la peur de la déception d'un espoir indicible, celui d'obtenir de l'être aimé une réponse miroir qui validera nos sentiments et nous donnera l'autorisation de continuer à cultiver cet état d'amour. Cependant, en attendant cette réponse, nous privons l'autre de la possibilité de ranger nos mots d'amour dans son petit cœur et de les garder au chaud. Nous l'obligeons malgré nous à aussitôt nous les rendre.

Je te donne un chocolat mais avant même que tu ne puisses y goûter, rends-le-moi.

Il est trop tard, la machine est en marche, c'est un véritable battle d'amour qui commence!

"Je t'aime" par-ci, "Je t'aime" par là, des "Je t'aime", en veux tu, en voilà, l'obtention d'une réponse similaire systématique nous donnant l'illusion de la sécurité, d'une garantie de réciprocité des sentiments qui valide, ravive et entretient nos élans d'amour et de tendresse passionnée, encore et encore.

Jusqu'à ce que, le temps faisant son œuvre, cette phase initiale de passion biochimique, de déferlement de neurotransmetteurs alimenté par la nouveauté de la relation et les câlins à outrance s'étiole peu à peu.

On passe du "Je t'aime" éclatant et exalté, ressenti de toute notre âme, au "Je t'aime" de convention, au "Je t'aime" normalisé que l'on se dit comme on se dirait "Bonne journée" ou "Bonne nuit".

Ce "Je t'aime" qui nous élevait toujours plus haut, qui faisait frétiller chaque cellule de notre corps, se trouve alourdi et finalement, il sonne creux.

Que s'est-il passé?

C'est comme si le répéter encore et encore l'avait vidé de sa substance, comme si nous avions épuisé notre réserve d'amour.

On en arrive à s'inquiéter, à douter, "Est-ce que je l'aime encore?". Plus terrible encore, si l'autre ne répond pas, "M'aime-t-il, m'aime-t-elle, encore?".

Bien que le verbe soit un moyen efficace de communiquer notre amour, lorsqu'il est trop exprimé, il perd de son sens. Sa vibrance en nous diminue en intensité.

Alors, peut-être est-il plus sage de le préserver de cette banalisation, de conserver sa préciosité et sa valeur au profit de "Je t'aime" silencieux, qui gagneront à être exprimés par d'autres biais.

Ainsi, la reconnaissance de nos qualités mutuelles, une étreinte prolongée, une attention offerte ou un service concret sont tout autant de "Je t'aime" déguisés, plus consistants que des mots flottant dans les airs, plus mémorables et à n'en point douter reconnus et accueillis par notre autre.

Ces "Je t'aime" exprimés par nos comportements et nos actes sont eux aussi, de merveilleux cadeaux. Ils nous enrichissent et enrichissent nos relations, quelles qu'elles soient, de manière considérable.

Toutefois, il n'y a ici pas d'injonction à se taire en permanence, pas d'interdiction de "Je t'aime", les extrêmes sont rarement bons, juste une invitation à conscientiser la valeur de ces mots et à apprendre à les distiller et à les offrir à l'autre avec justesse et sincérité, sans oublier d'en laisser quelques uns nous remplir pleinement, dans l'intimité de notre cœur. Ces "Je t'aime" muettement ensemencés en notre for intérieur, ceux que l'on garde et ceux que l'on reçoit, cultivent en nous un état d'amour depuis lequel nous pouvons interagir avec le monde de la meilleure des façons, pour notre plus grand bien et pour le plus grand bien de tous.

Pour conclure, allons encore un peu plus loin.

Les grands mystiques estiment que cet état d'amour est la nature véritable de l'humain, la nature véritable de la vie elle-même et que depuis cet état, l'échec est impossible, qu'on ne peut être que sur le bon chemin.

Alors, au cas-où ils auraient raison, ça vaut le coup d'essayer non?


 
 
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